La bibliothèque idéale de l’homme de droite

Carl Spitzweg, Le rat de bibliothèque, détail, huile sur toile, 1850
Carl Spitzweg, Le rat de bibliothèque, détail, huile sur toile, 1850

La liste suivante énumère certaines des œuvres majeures qu’un bon penseur, qui se dit de droite, devrait posséder dans sa bibliothèque. Hélas, si l’on en veut établir une qui ne soit pas trop longue – car l’on manque de temps, de nos jours, pour lire ! – il faut bien se résoudre aux choix. Ces choix, les voici donc :

  1. Seuls les auteurs français seront proposés : après tout, « une nation n’est qu’une langue », disait de Maistre. Ne seront donc pas évoqués les penseurs conservateurs allemands tel que Spengler, ni l’Italien Pasolini, particulièrement virulent contre la société moderne bourgeoise et consumériste.
  2. Horace disait que « ce qui a passé cent ans est vieux et sérieux » : l’histoire avance, et relègue à l’oubli nombre de penseurs, philosophes et romanciers. L’on nous pardonnera, par conséquent, d’arrêter nos choix sur les auteurs les plus emblématiques, les plus connus : s’ils ont pu rester dans la mémoire collective, c’est parce qu’ils ont incarné des époques, et développé des pensées devant trouver des échos intemporels.
  3. Cette bibliothèque est celle d’une droite dure, extrême diraient ses détracteurs, moins pour la qualifier correctement, que pour la teinter d’une connotation péjorative. Par conséquent, la droite dite libérale y sera exclue, et tout ce qui s’y trouve à gauche, avec tout le subjectivisme que cela comporte – ainsi de Benjamin Constant, pour n’en citer qu’un.
  4. Seuls des écrivains de droite, ayant analysé la droite, ou ayant eu, d’une manière ou d’une autre, consciemment ou non, une pensée de droite, seront recensés : nous ne citerons pas les figures de gauche, même celles ayant pu marquer la pensée de droite.
  5. Même si la droite puise parfois ses ressources très loin, seuls des auteurs postérieurs à 1789, date de l’invention des termes de « droite » et de « gauche » seront listés (à l’exception des moralistes du Grand Siècle).
  6. Enfin, ne seront pas listées les œuvres trop revendiquées, parce que trop indépendantes de toute idéologie, à l’image, pêle-mêle, de Proust, Balzac, ou Giono.

Il nous faut indiquer une dernière remarque : outre le fait que cette liste n’est pas exhaustive, elle n’est pas cohérente. L’on y trouvera plusieurs courants, plusieurs nuances, qui parfois s’opposeront comme le soleil et la lune : à chacun de lire, de choisir, et de penser.

1. Les contre-révolutionnaires contemporains de la révolution, et du dix-neuvième siècle

Maistre, Joseph (de), Œuvres, Paris, éd. Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2007.

Betran de Balanda, Flavien, Louis de Bonald, Philosophe et homme politique (1754-1840), Paris, éd. CNRS, 2021.

Barbey d’Aurevilly, Jules, Une vieille maîtresse – L’Ensorcelée – Un prêtre marié – Les Diaboliques – Une page d’histoire, Paris, éd. Robert Laffont, coll. « Bouquins », 1981.

Villiers de l’Isle-Adam, Auguste (de), Contes cruels, Paris, éd. Folio, coll. « Folio classique », 1983.

2. La droite « gentilhomme des décadences », celle qui se complaît dans le déclin

Chateaubriand, François-René (de), Œuvres romanesques et voyages (deux tomes), Paris, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1969.

Chateaubriand, François-René (de), Mémoires d’outre-tombe (deux tomes), Paris, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 2015.

Chateaubriand, François-René (de), Essai sur les révolutions – Génie du christianisme, Paris, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1969.

Ormesson, Jean (de), Mon dernier rêve sera pour vous – Une biographie sentimentale de Chateaubriand, Paris, éd. LGF, coll. « Le Livre de Poche », 1983.

Ormesson, Jean (de), Œuvres (deux tomes), Paris, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 2018.

  • À lire spécialement :
    La Gloire de l’Empire
    Au plaisir de Dieu
    Histoire du Juif errant
    Le Vagabond qui passe sous une ombrelle trouée
    Je dirai malgré tout que cette vie fut belle

3. La droite anarchiste

Il ne sera pas inutile de lire les morales du Grand Siècle, dont s’inspirent souvent les anarchistes de droite, tel Nietzsche qui les pastiche dans Le Gai savoir : il s’agit principalement des Maximes de La Rochefoucauld, des Caractères de La Bruyère, et des sermons et oraisons funèbres de Bossuet. Et pourquoi pas, au passage, lire aussi les Mémoires du Cardinal de Retz, un chef-d’œuvre absolu de la langue française, écrit par le témoin malheureux de la victoire de l’absolutisme royal ?

Rebatet, Lucien, Le Dossier Rebatet : Les Décombres – L’inédit de Clairvaux, éd. Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2015.

Rebatet, Lucien, Les Deux étendards, Paris, éd. Gallimard, coll. « Blanche », 1991.

  • L’on connaît la célèbre phrase de Mitterrand : « Il y a deux sortes de lecteurs : ceux qui ont lu Les Deux étendards, et les autres. »

Céline, Louis-Ferdinand, Romans (quatre tomes), Paris, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1974-1993.

4. Les historiens, les philosophes et les politologues

Tocqueville, Alexis (de), L’Ancien Régime et la Révolution, Paris, éd. Gallimard, coll. « Folio histoires », 1967.

Tocqueville, Alexis (de), De la démocratie en Amérique, Paris, éd. Flammarion, coll. « GF », 1999.

Renan, Ernest, Histoire des origines du christianisme, Paris, éd. Robert Laffont, coll. « Bouquin », 1995 (deux tomes).

Taine, Hippolyte, Les Origines de la France contemporaine, Paris, éd. Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2011.

Bainville, Jacques, Histoire de France, Paris, éd. Perrin, coll. « Tempus », 2014.

  • Outre une somme d’écrits publiée chez Laffont dans la collection « Bouquins » (La monarchie des lettres : Histoire, politique et littérature) en 2011, il ne sera pas inutile de lire le Napoléon, très récemment réédité chez Phœnix : lien juste ici.

Guénon, René, La Crise du monde moderne, Paris, éd. Gallimard, coll « Folio essais », 1994.

Rémond, René, Les Droites en France, Paris, éd. Aubier, 1992.

  • À compléter par Les Droites aujourd’hui, du même auteur, éd. Points, 2007.

Girard, René, La Violence et le sacré, Paris, éd. Fayard, coll. « Pluriel », 2010.

Girard, René, Mensonge romantique et vérité romanesque, Paris, éd. Grasset, coll. « Pluriel », 1961.

Girard, René, Le Bouc émissaire, Paris, éd. LGF, coll « biblio essais livre de poche », 1986.

5. Les grands hommes

Gaulle, Charles (de), Mémoires, Paris, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 2000.

Stendhal, Mémoires sur Napoléon, Paris, éd. Climats, 1998.

Constant, Mémoires sur la vie privée de Napoléon, sa famille et sa cour, Paris, éd. Cremille, 1971.

Benoist-Méchin, Jacques, Le Rêve le plus long de l’histoire (deux volumes), Paris, éd. Omnibus, 2012.

  • Biographies d’Occidentaux ayant furieusement désiré l’Orient, d’Alexandre le Grand à Lawrence d’Arabie, en passant par Napoléon.

6. Les penseurs et romanciers du tournant, et de la première moitié du vingtième siècle

Bloy, Léon, Le Désespéré, Paris, éd. Flammarion, coll. « GF », 2010.

Bloy, Léon, Essais et pamphlets, Paris, éd. Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2017.

Bourget, Paul, Le Disciple, Paris, éd. LGF, coll. « Classiques Livre de Poche », 2010.

Barrès, Maurice, Romans et voyages (deux volumes), Paris, éd. Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2014 et 2018.

Maurras, Charles, L’Avenir de l’intelligence, et autres textes, Paris, éd. Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2018.

Péguy, Charles, Mystique et politique, Paris, éd. Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2015.

Bernanos, Georges, Essais et écrits de combats (deux tomes), Paris, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1972 et 1995.

Bernanos, Georges, Œuvres romanesques complètes suivi de Dialogue des Carmélites (deux tomes), Paris, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 2015.

Drieu la Rochelle, Pierre, Mémoires de Dirk Raspe, Paris, éd. Gallimard, 1966.

7. Les penseurs et romanciers de la première, et de la seconde moitié du vingtième siècle

Mauriac, François, Œuvres romanesques et théâtrales complètes (quatre tomes), Paris, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1978-1985.

  • À lire spécialement :
    Thérèse Desqueyroux
    Le Nœud de vipères

Gracq, Julien, Le Rivage des Syrtes, Paris, éd. José Corti, 1989.

8. Les contemporains

Benoist, Alain (de), Ce que penser veut dire, Paris, éd. du Rocher, 2017.

Benoist, Alain (de), Contre le libéralisme, Paris, éd. du Rocher, 2019.

Camus, Renaud, Le Grand remplacement, Paris, éd. Chez l’auteur, 2019.

Raspail, Jean, Le Camp des saints, Paris, éd. Robert Laffont, 2011.

Raspail, Jean, Là-bas, au loin, si loin, Paris, éd. Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2015.

Houellebecq, Michel, Les Particules élémentaires, Paris, éd. J’ai Lu, 2010.

Compagnon, Antoine, Les Antimodernes, de Joseph de Maistre à Roland Barthes, Paris, éd. Gallimard, coll. « Folio essais », 2005.

Obertone, Laurent, La France Orange mécanique, Paris, éd. Magnus, 2022.

Zemmour, Éric, Le Suicide français, Paris, éd. Albin Michel, 2014.

Rochedy, Julien, Nietzsche l’actuel, éd. Julien Rochedy, 2020.

Rochedy, Julien, Philosophie de droite, éd. Hétairie, 2022.

Cette liste est, bien sûr, loin d’être exhaustive : il y manque presque toute la littérature classique, aux sources de laquelle s’abreuve la pensée de droite, par esprit de tradition, et d’imitation. À ceux qui la voudraient compléter, nous ne pourrions que conseiller la Bibliographie générale des droites françaises, établie par Alain de Benoist. Nous conseillerons également, pour ceux qui voudraient ne pas passer à côté des auteurs les plus représentatifs de notre patrimoine littéraire, Une autre histoire de la littérature française, de Jean d’Ormesson, publiée en deux tomes chez Gallimard (folio).

Si vous aimez ces articles ainsi que la littérature classique, découvrez mes ouvrages publiés.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *